MAUMEJEAN Alain

Je_

je – qui n’est jamais, bien sûr, toujours moi – m’approche de mes soixante-douze années, me livrant encore à l’exercice d’enseigner le tennis, dilettantisme de la communication, et me suffisant, depuis plus de vingt ans, de douze nuits d’hiver pour ne communiquer par l’écriture qu’avec lui, ce moi-même que je ne suis jamais ; né en 1942, définitivement accueilli par l’immaturité en 1966, je n’aurai fait que braver la contradiction par laquelle ce que j’estime essentiel est une sauvegarde qu’il vaut mieux célébrer au versant du silence ; je fus l’enfant qui perdit sa mère si tôt que celle-ci reste, au plus secret de l’intime attente, sa seule, inespérée, lectrice.

 

Écrire_

prétendre se rendre digne du respect que l’on porte à l’essence de l’humain par le biais du langage écrit semble vouloir s’approcher de l’illusion sans remède dont se nourrit notre passion de nous confronter à ce qui « se montre » (Wittgenstein) et ne peut être dit ;

écrire ne serait-il donc pas « la tentative rhétorique de nous convaincre de préserver en nous l’abri d’un trésor qui n’a pas de nom, tentative, en tout état de cause irréalisable, de réduire la contradiction qu’un destin fatal imposé à la condition de l’humain par le langage : l’usage d’une parole par laquelle nous sommes voués à l’inconnaissance » (de l’auteur dans « La poésie, c’est autre chose » Arfuyen 2008).